La revue d'architecture et de design
Interview designer Lisa Allegra
Reprise des interviews sur le Blog Esprit Design, une rubrique me tenant particulièrement à coeur où nous allons ensemble à la rencontre d’un acteur du monde du design ou de l’architecture.
Parcours, conseils, métier, le but étant de comprendre le travail de chacun, les contraintes et les envies au travers des questions simples.
Pour cette rentrée, Lisa Allegra jeune femme designer française nous ouvre les portes de son bureau.
– Mettons un visage sur le nom ?
Loupé pour le visage, préservons alors le mystère…
– Peux tu nous expliquer ton / votre parcours, formations en quelques mots ?
J’ai fait une année de faculté d’art plastique à la Sorbonne puis cinq années d’étude à l’Ecole des Arts décoratifs de Strasbourg d’où j’ai été diplomée en 2010.
– Tu as effectué ta formation du côté Strasbourg, à l’Ecole Sup des Arts Décoratifs, quels sont vos souvenirs ?
Je voulais rentrer aux arts décoratifs de Strasbourg pour la richesse de ses ateliers. En cinq ans, j’ai pu faire de la céramique, du bois, du métal, de la sérigraphie.
Mes souvenirs les plus ancrés sont donc des souvenirs d’atelier, les mains dans la terre ou la sciure de bois. Quand on veut faire du design, l’ordinateur et la 3D sont des outils nécessaires mais l’expérimentation des matériaux est, pour moi, indispensable.
– Peux tu définir ton travail en un mot ? Un objet ?
Contraste, déséquilibre, contre-emploi.
Le tabouret BENDEM est en bois et porcelaine. Je l’ai fait à la suite d’une histoire que l’on m’a racontée. Un bus anglais pourrait tenir sur quatre petites tasses en porcelaine anglaise…
J’ai voulu jouer sur ce contraste entre fragilité et robustesse et l’accentuer par le déséquilibre apporté par le porte-à-faux.
– Quelle a été ta première création ?
Comme tout le monde j’ai dû faire de magnifiques colliers de pâtes quand j’étais gamine!… Les premières créations ne sont jamais celles dont on veut se rappeler.
– Parmi tes créations quelle est celle que tu aimes le plus ?
L’objet qui me tient à coeur actuellement est le porte-manteau ITA qui a gagné le concours FLY édition 2012.
Avoir un projet qui soit édité et produit par une marque aussi importante que FLY est très stimulant. C’est à ce moment là que notre métier devient concret parce qu’il rentre chez les gens.
– Quels sont les designers qui vous inspirent ou que vous appréciez particulièrement ?
Naoto Fukasawa. Il ne cherche pas à créer de nouveaux besoins, il observe la façon de vivre de chacun pour en sortir des objets nouveaux correspondants à nos habitudes de tous les jours.
Do Ho Suh et ses architectures en tulle qui flottent dans les airs. J’aime ce contraste entre cette forte présence (minutie et couleur) et cet aspect évanescent (transparence et flottement).
– Je vois que vous collaborez avec Constance Guisset, pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
J’ai effectué un stage dans l’agence de Constance Guisset en 2011.
Travailler dans une agence à été l’occasion de voir comment appliquer un processus créatif à un cahier des charges bien précis. Ce que j’ai appris au contact du travail de Constance c’est de réussir à garder une entière liberté sur ses projets tout en s’adaptant aux contraintes liées à la demande d’un client.
– Certaines de vos pièces allient textiles et bois .. Pourquoi ces choix ?
C’est vrai que je trouve l’alliance du bois et du textile intéressante et plus généralement les objets bi matières. Mais plus que de réunir ces deux matières dans un même objet (ce qui est plutôt courant) je m’intéresse à la manière dont je vais les lier ensemble.
Par exemple, dans l’assise SUMO je voulais qu’on puisse utiliser une action quotidienne, spontanée faisant référence au domaine de l’habillement (geste lié au corps). L’action de nouer est un geste efficace, rapide, facile qui confère à l’objet une simplicité et une évidence sans rien enlever à son confort.
– Noms et style de vos créations nous transportent du côté de l’Asie, cela est-il prémédité ?
Pendant mes années d’études j’ai lu des livres comme l’éloge de l’ombre de Junichiro Tanizaki ou je me suis interessée à l’esprit Mingei (philosophie sur les objets au Japon).
J’aime cet esprit synthétique et raffiné à la fois. La capacité d’arriver à faire d’une forme très simple un objet chaleureux.
Encore une fois c’est un jeu de contraste et d’équilibre à trouver. C’est ce que j’aspire à faire dans mon travail.
– A quoi ressemble votre bureau ?
– Pour toi, le plus important dans une création est ? La Praticité ? La Poésie ? L’Usabilité ? La Processus de création simplifié ?… L’humour ?
Tout est important. Un objet, pour qu’il ait sa place dans un habitat, doit être pratique et pensé pour un usage quotidien mais le principal sujet d’un objet n’est pas là. Il faut raconter une histoire, émouvoir, faire rire ou agir comme une madeleine de Proust.
– A quoi ressemble une journée type pour Lisa Allegra ?
Ce serait difficile de vous raconter mes journées types de cette année! Je suis partie pendant presque un an faire un grand voyage autour du monde.
Ce qui est extraordinaire quand on voyage c’est qu’aucune de nos journées ne se ressemblent. On est toujours dans l’émerveillement de la découverte, attentif à tout ce qui nous entoure et à ce que l’on voit pour la première fois… L’expèrience la plus forte et enrichissante de toute ma vie qui remplit la tête et les carnets de croquis de milliers d’idées !
– Que penses-tu de l’effervescene autour de la déco, du design ces dernières années à la télévision et sur internet ?
La télévision est un média qui récupère tout ce qui est tendance: la déco, le design, la cuisine… Dans la plupart des émissions de grande écoute, on plaque de jolies images et l’on fait croire que ça s’arrête là.
Je trouve ça important qu’on s’intéresse au designer derrière le produit car on peut avoir une vision plus globale de son travail et connaître sa démarche. Mais se servir d’un nom de designer comme d’une marque n’a, je trouve, pas d’intérêt car cela fait acheter le produit pour de mauvaises raisons.
– Quelle est ta méthode de travail ?
Mes idées, je les ai toujours la nuit donc je fais en sorte d’avoir un carnet et un stylo à porté de main. Mes croquis de départ sont donc très simples, c’est une façon de ne pas oublier mes idées.
J’ai aussi besoin de parler pour “accoucher” de mon idée. C’est en formulant mes envies que je vois si cela peut marcher ou pas. Je passe très vite au stade de la maquette échelle un, avec tout ce qui me passe par la main, carton, papier, bois. Cela me permet d’expérimenter l’objet et de voir son interaction avec l’espace. Après il faut peaufiner le dessin et refaire des maquettes jusqu’à ce que le résultat me plaise.
– Où puises tu ton inspiration ?
Tout est une source d’inspiration, je suis une vraie éponge.
Le voyage dont j’ai parlé précédemment a été une source d’inspiration nouvelle. Mes dessins sont plus colorés et plus en rondeurs qu’auparavant. Je pense que les objets qui vont émaner de ce voyage vont être assez différents.
– Consultes tu régulièrement des livres, sites, blogs consacrés au design ?
Des livres, des blogs, des magazines… je me nourris d’un peu de tout mais pas uniquement dans le domaine du design. Art contemporain, architecture, danse, musique…
– Ou te vois tu dans 5 ans ? 10 ans ?
Personnellement, je suis quelqu’un qui fonctionne par objectif et j’ai toujours besoin de me projeter pour avancer. J’aime assez l’idée de monter un collectif avec des artistes, graphistes, architectes, designers qui pourraient travailler sur des projets communs ou individuels. Je pense que l’on est de plus en plus de jeunes à penser à ce type de structure.
Nous sommes à une époque où nos disciplines sont transversales et où le réseau a beaucoup d’importance. Sinon l’idée de m’installer à l’étranger me tente de plus en plus.
– Penses tu qu’il y a un problème pour les designers en france ?
En règle générale, nous ne sommes pas dans une bonne période pour exercer un métier dans le domaine de la création. Il y a de plus en plus d’écoles d’art et nous sommes de plus en plus nombreux à vouloir faire du design d’objet mais il n’y a pas, pour autant, plus de travail. En ce qui concerne les designers indépendants, rares sont ceux qui peuvent vivre uniquement de leur création.
En revanche, dans les grandes entreprises, les designers sont de plus en plus sollicités car il y a une vraie prise de conscience quant à l’intérêt du design pour vendre un produit.
– Pourquoi accepter de répondre à mes questions ?
C’est un exercice très interessant pour un jeune designer, d’arriver à poser, exprimer, partager les points importants de son travail mais c’est également très difficile. C’est pour cela que j’ai choisi un domaine où je peux m’exprimer autrement que par les mots.
– Est-il possible, pour terminer de nous faire part d’un visuel spécial BED : Blog Esprit Design by Lisa Allegra ?
Je vous laisse donc interpréter la photo…
– As tu un nom à nous donner pour une prochaine interview ?
Naïs Calmettes et Rémi Dupeyrat d’ Artisan social designer. Galerie parisienne qui a ouvert en 2011 et qui expose des jeunes artistes et designers ayant une vraie pratique d’atelier.
– Quelle est ton actu ? Quels sont tes projets en cours ? Les prochains ?
Mon porte manteau ITA va sortir dans les magasins FLY d’ici la fin de l’année 2012. Je viens à peine de rentrer de mon voyage donc j’ai un grand besoin de travailler en atelier à de nouveaux projets. Je vais d’ailleurs entamer un travail sur une série d’objets en binôme avec la sculpteur Sandrine Bringard (Sandrine Bringard).
Toujours cette envie d’être à la frontière entre plusieurs domaines de création.
Je vous invite aussi a suivre l’évolution de mon travail sur mon site internet
Merci à Lisa pour sa disponibilité et gentillesse, comme quoi, l’humain reste et restera toujours le plus important…
Plus d’informations sur le designer : Lisa Allegra
Je conseille à Lisa Allegra de mettre son nom dans google image visage…
Elle verra que c’est un designer sans visage…. Comment faire une attribution de projet et de produit à un designer sans nom connu et sans visage? Elle sereconnaitra sans doute parmi 100 visages avec ce mot clef..
Et encore cette photo n’est pas taguée …
[img]http://www.blog-espritdesign.com/wp-content/uploads/2012/09/interview-lisa-allegra-blog-espritdesign-2.jpg[/img]
@Bob le homard
Pour certains distributeurs ou organisateurs ce qu’on lit dans la presse est plus important que ce l’on voit en magasin, ou en salle d’expo…
En temps que visiteur mystère, je me suis accroché aussi avec un chef sous chef quart de chef de mag Ikea à propos de la collection PS qui n’était pas clairement exposé… J’ai compris que la com presse avec un name dropping
( Jungerius, Front design) est plus important que le balisage magasin et la mise en place produits en magasin.
Je suis allé en Province voir une expo Matali Crasset dans un centre d’art.. Je demande à l’accueil Quesaco … Qui, vous dites? Connais pas…
Pour la même,dans une autre province,à 800km je pose la question à un office de tourisme Quesaco … Qui, vous dites? Connais pas…
Même chose, et aucun produit ayant gagner était en vue dans le magasin..
FLY OVER THE FRENCH DESIGN
Je suis aller chez Fly dans une zone commerciale quelque part en province Quand j’ai parlé aux vendeurs du concours de design , j’avais l’impression qu’il me regardait comme un extra terreste sorti de Paris intramuros entre l’Ensci et le Via… Quésaco? Comme quoi la com interne, c’est aussi important que la com externe …
[img]http://deco-design.biz/wp-content/CONCOURS_FLY_DESIGNER.jpg[/img][img]http://www.guillaumedumay.com/wp-content/uploads/2012/02/384577_210350849047266_100002170582424_439208_988951345_n.jpg[/img]