La revue d'architecture et de design
Le design, moteur des Jeux Olympiques Paris 2024
On passe notre temps à le marteler, les Jeux Olympiques Paris 2024 en sont le parfait exemple : le design dépasse la seule discipline esthétique, et forme dans notre quotidien et au-delà, l’assurance d’un environnement bien conçu, pour chacun, répondant aux besoins et aux attentes les plus complexes d’un monde en mutation perpétuelle. Coup de projecteur sur l’évènement du moment, en France, et son appel au design pour que tout soit beau ET bien fait.
La torche olympique
On vous en parlait il y a tout juste un an, c’est Mathieu Lehanneur, justement nommé designer de l’année par Maison&Objet, qui s’était chargé de la conception de la torche olympique. Elle a depuis sillonné terres, mers et océans pour finir sa course dans les mains de quelques personnalités parmi lesquelles Zinédine Zidane, Raphaël Nadal, Nadia Com?neci, Carl Lewis, Amélie Mauresmo, Tony Parker, Alexis Hanquinquant, Nantenin Keita, Marie-Amélie Le Fur, Michaël Guigou, Allison Pineau, Jean-François Lamour, Felicia Ballanger, Florian Rousseau, Émilie Le Pennec, Clarisse Agbégnénou, Alain Bernard, David Douillet, Laura Flessel, Renaud Lavillenie, Laure Manaudou, Charles Coste (le plus ancien champion olympique français en vie, né en 1924 !) pour finir entre les mains de Marie-José Pérec et Teddy Riner ! Ils se sont à leur tour dirigé vers l’ultime but des relais de la flamme, la vasque !
Le vasque olympique
Une vasque de 30 mètres de haut avec anneau-flamme de 7 mètres de diamètre, rien que ça ! Là encore, à la conception, Mathieu Lehanneur et son équipe. L’idée était d’offrir une vasque autour de laquelle, chaque jour pendant les Jeux, 10?000 personnes puissent s’approcher entre 11h et 19h. Ensuite, du coucher du soleil jusqu’à 2h du matin, la montgolfière 2.0 prend son envol pour se hisser à plus de 60 mètres du sol. L’histoire de cette vasque des airs n’est pas sans un hommage aux pionniers des objets volants que compte la France. En 1873, dans cette même ville qu’est Paris, se déroulait le tout premier vol de l’histoire de l’humanité. Des frères Montgolfier avec leur ballon à air chaud à l’ingénieur Henri Giffard qui invente le ballon captif en passant par le physicien Jacques Charles et son ballon à gaz rempli d’hydrogène, la France fait figure de pionnière dans le développement de ces engins qui ont permis à la technique d’avancer, toujours plus haut, toujours plus vite, toujours plus sereinement. Sous ce ballon, plein de sens, la vasque se veut quant à elle tournée vers le futur ; un futur plus responsable ! Et quoi de mieux pour ce faire que de bannir l’énergie fossile nécessaire à alimenter la flamme de la vasque pendant toute la durée des jeux ? C’est le défi relevé par Mathieu Lehanneur accompagné par les équipes de design et de recherches de EDF.
L’une des innovations développées par EDF réside dans le challenge de d’acheminer les flux d’électricité et d’eau à haute pression vers l’anneau-flamme, via le même câble qui maintien le ballon, tout en offrant la capacité de suivre les mouvements de la Vasque lorsqu’elle est en vol. C’est, en outre, 40 projecteurs d’une puissance colossale pour que le mirage fonctionne même en journée, fournissant un équivalent à 4 millions de lumens ! Côté eau, 200 buses de brumisation haute pression dites basse consommation (3m3/heure lorsque la Vasque est en vol, avec une réduction à 2m3 lorsqu’elle est au sol), l’eau étant réutilisée à partir du miroir d’eau du Jardin des Tuileries situé juste en dessous.
L’anneau-flamme a été fabriqué par l’entreprise nantaise Atelier Blam, spécialisé dans la réalisation de pièces d’exception pour les secteurs de l’architecture, du design et de l’art. L’atelier, que l’on suit depuis de nombreuses années, est notamment connu et reconnu pour avoir réaliser différentes pièces pour le duo Bouroullec ; on pense notamment aux exemplaires de Ring visibles à Poitiers ou au Vitra Museum, mais aussi aux œuvres en céramiques un temps exposées à la Galerie Kreo.
Le chaudron olympique
Pour rappel, Mathieu Lehanneur, c’était aussi le chaudron olympique, dévoilé sur le Vieux-Port de Marseille ! Pour le designer et le comité, la Torche exprime l’Égalité par sa symétrie (notamment entre les genres, entre valides et handi-sports, entre pays), le Chaudron du Relais, avec sa forme pure, circulaire et infiniment infinie, symbolise quant à lui la Fraternité. Il manquait, pour parfaire le trio incarnant la devise nationale, la liberté ! La vasque olympique symbolise, par son envol, cette même liberté !
Zeus, le cheval métallique de la cérémonie d’ouverture
Alors, ce cheval de métal, quel était son secret, pour faire ce parcours de 6km aussi gracieusement, à plus de 27km/h ? Sa presque anonyme cavalière Morgane Suquart le connaît bien, et pour cause, puisqu’elle est co-fondatrice de la société bretonne MMProcess (avec Madeg Ciret-Le Cosquer) qui est à l’origine de la conception du système de flottaison, matérialisé par trois coques en aluminium sous-marines. La partie ingénierie et design a été assurée, là encore, par les nantais de chez Atelier Blam qui a brillament sû faire dialoguer poésie et technique. C’est ainsi que Morgane pouvait d’elle-même diriger la course du cheval, via des rênes reliées au safran. Les tests de l’animal ainsi parodié ont donc débutés… dans l’océan !
La cérémonie d’ouverture, de haute couture vêtue
La cérémonie, orchestrée par le directeur artistique Thomas Jolly et ses différents partenaires, fait le portrait d’une France tournée vers ses créateurs, avec au programme du design, de la scénographie, de la lumière, de l’ingénierie, de la musique, mais aussi de la mode !
La mannequin Farida Khelfa, muse de Jean Paul Gaultier et d’Alaïa dans les années 80, s’est élancée avec une robe d’Alphonse Maitrepierre
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Victor Weinsanto, que l’on avait eu l’occasion de croiser aux Grands Prix de la Création de la Ville de Paris, s’est illustré en présentant ses créations. C’est aussi le cas de Jeanne Friot, dont le travail a accompagné la chevauchée de la cavalière au cheval de métal. On pense également à la marque C.R.E.O.L.E de Vincent Frédéric Colombo (présent lui-même dans le défilé), Ouest Paris par Arthur Robert ou encore le label Kévin Germanier, par le créateur éponyme ! Les costumes, véritable marque de fabrique de cette cérémonie, font partie d’un véritable projet d’ensemble, mené notamment par Daphné Bürki ou encore Olivier Bériot, spécialiste en la matière (connu notamment pour avoir travaillé avec Besson, le Puy du Fou, ou encore sur la série Netflix Lupin).
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Ajoutez à cela, une dose de LVMH, partenaire de ces Jeux Olympiques Paris 2024, accompagnant les athlètes français avec des costumes bleu marine au col en dégradé vers le rouge, chemises blanches et mocassins signés Berluti mais également par les plateaux de présentation des médailles, entre autres. Un constat d’une image soignée pour le pays et ses pépites tant sportives qu’entrepreneuriales qui se vérifient au sein de plusieurs délégations, avec une délégation namibienne vêtue par Yves Salomon, des italiens habillés en Emporio Armani, ou encore des Américains en Ralph Lauren. La Mongolie, saluée pour la beauté de ses tenues, rejoint par l’Algérie, l’Arménie ou le Népal a fait le choix de tenues traditionnelles pour défiler sur la Seine.
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Et pour lier tout ça, une identité graphique réalisée toute spécifique !
Au-delà de la cérémonie, c’est l’ensemble de l’organisation des jeux qui marque, en France comme ailleurs. Une attention aux détails jusque dans l’identité graphique, inclusive et pétillante, dont le travail revient à l’agence W Conran Design, aussi responsable de la nécessaire montée en gamme du tournois de tennis Roland Garros cette dernière décennie (on vous en parlait ici !). La presse internationale est subjuguée par la mise en valeur des différents lieux offerts aux compétiteurs (on parle notamment du Grand Palais, du Stade Tour Eiffel, mais aussi de la place de la Concorde, ou encore des jardins du Château de Versailles !). L’ensemble de ces lieux liés par une identité constante, justement adaptée.
Les Jeux Olympiques à l’échelle nationale, c’est aussi des artistes, des marques, des lieux inspirés (comme les pavillons des différents pays) ! On pense notamment au travail du maroquinier Camille Fournet, dont les récentes productions sont inspirées par l’évènement, ou encore les quelques expositions parisiennes tournées autour du sport, comme notamment l’exposition Match, design & sport qui se tient au Palais du Luxembourg (on vous en parlait ici !).
Et vous, qu’est-ce qui vous marque le plus durant ces jeux ?