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AD Intérieurs 2015 – Les Décors – Le bureau connecté d’Oitoemponto
Poursuivons notre dossier dédié à l’exposition Ad Intérieurs 2015 par la présentation de chacun des décors.
Imaginé par le duo de décorateurs Jacques Bec et Artur Miranda de l’agence Oitomemponto basée à Porto, ce bureau connecté dégage une ambiance feutrée et raffinée.
Rencontre avec le duo Jacques Bec et Artur Miranda d’ Oitoemponto:
– Pouvez vous nous expliquer votre démarche créative?
JB: Tout est parti de la réflexion de Marie Kalt (rédactrice en chef d’AD Magazine) qui posait la question du comment allait on vivre demain. L’idée du bureau nous est venue d’une réflexion: avec tous nos appareils connectés le lieu bureau où l’on va travailler se dématérialise de plus en plus et notre clientèle nous demande de faire un bureau à la maison pour pouvoir travailler chez soit tout en étant connecté au monde.
Donc c’est apporter le bureau et apporter l’esprit maison au bureau. Ce n’est pas seulement un lieu de travail c’est aussi un lieu convivial où on peut recevoir des gens, les amis, les enfants peuvent être la. Travailler et accompagner représentent le changement.
AM: Notre travail est de connaitre cette personne et faire quelque chose de sur mesure. Ici nous avons carrément inventé un personnage pour pouvoir créer l’espace. Pour ce bureau connecté nous avons pensé à une femme tradeuse qui vit scotchée à ses écrans, une femme cosmopolite et nous avons crée le bureau où elle travaille, avec son maquillage dans le tiroir quand elle souhaite se maquiller avant de sortir.
Nous n’aurions pas pu réaliser ce décors sans point de départ. Nos décors d’une manière générale ne sont pas très féminins mais ici nous avons essayé d’y mettre quelques petites touches qui le rend moins masculin et plus élégant, avec cette brillance, ce jeu de mats/brillants, les touches dorées omniprésentes qui donnent un côté précieux. Lorsque nous travaillons nous aimons bien ce coté éphémère réalisé d’une façon définitive.
JB: Les moyens mis en œuvre sont vraiment les vrais moyens qu’on aurait pu avoir dans une maison. Les marbres, les détails, le tapis dessiné pour Diurne avec son filet métallique, les écrans sont connectés en temps réel à la bourse… Nous n’aimons pas le coté vitrine, ce que nous ne faisons jamais d’ailleurs, car ce n’est pas du tout nos genres de décors: ils décors sont réels et on peut se les approprier. Nous avons toujours d’ailleurs ce petit blues à la livraison des chantiers parce qu’un chantier est une sorte de gestation et il faut ensuite couper ce lien et livrer la réalisation.
Notre travail est avant tout sur l’émotion, sur l’être humain, notre core business est la personne. La couleur des coussins est quelque chose qui n’a pas vraiment d’importance. L’important réside plutôt dans le fait de créer un lieu pour une personne: l’humain représente l’objet central de notre travail. L’émotion rentre en ligne de compte.
AM: Il y a également la partie technique. Nous sommes des techniciens et c’est aussi cela que nous apportons: notre expérience et connaissance. Nous avons fait des histoires qui deviennent transversales, passent par tous les clients. Pour les prochains clients nous aurons encore plus de connaissance et d’expérience.
JB: Les clients n’ont pas à savoir comment le bureau est connecté, car c’est notre cuisine interne. Il faut qu’il reste un coté magique et que tout fonctionne techniquement, que ce soit pratique, intuitif, et discret.
Aujourd’hui la technologie reste très visible, avec des fils apparents, mais ici effectivement on peut se permettre de n’avoir aucun fils et de garder une discrétion. La technologie est pourtant là mais reste très clean et propre.
AM: Je crois que c’était le défi proposé par AD avec cette thématique, on a tous vécu une idée du futur. Étant nés dans les années 60 on croyait quand on avait 15 ans que le monde aujourd’hui serait comme 2001 Odyssée de l’espace.
JB: La réalité future ne va jamais être celle qu’on s’imagine. Donc ici nous proposons une pièce avec du mobilier vintage, où la technologie est présente, sans pourtant être ce vaisseau spatial spectaculaire où on peut marcher sur les murs.
AM: D’ailleurs le film le plus réaliste portant une vision du futur est sans doute Blade Runner. et amalgame les sentiments qui seront plus actuels dans le monde qu’on vit aujourd‘hui. Nous essayons de rendre Blade Runner un peu plus chic. Je pense que dans le futur l’environnement va devenir très bruyant et sale, et que l’intérieur sera au contraire très propre, comme des sortes de cocons pour s’évader et se protéger de ce monde agressif.
JB: Les persiennes devaient au départ se rabattent automatiquement en fonction de la luminosité extérieure grâce à la domotique, mais pour des raisons techniques nous n’avons pas de fenêtres dans la pièce. Nous avons donc réalisé des fausses fenêtres et axé la pièce sur le bureau connecté. C’est d’ailleurs la première question des visiteurs: est ce que le bureau marche? Ce bureau est un prototype et il y a déjà des personnes qui sont intéressées.
AM: lorsque nous avons crée cette histoire avec cette femme tradeuse, la thématique est devenue un peu subversive car nous avons réalisé un décors conçu pour la femme et en fin de compte ce bureau est devenu l’objet fétiche des hommes quand ils rentrent. Ce qui est assez drôle. Ce sont les hommes qui veulent ce bureau et se l’approprient. Le bureau se transforme en coiffeuse grâce aux écrans connectés du bureau se transforment en miroirs une fois éteints. Il y a aussi tout le nécessaire à maquillage dans les tiroirs.
JB: Ce qui est apparu lorsque le projet s’est mis en place est qu’il y avait toujours des lieux à double emploi et ça fait aussi parti de l’évolution du gout des gens. L’objet peut être plusieurs choses en même temps et ne plus se cantonner à un type d’utilisation.
AM: C’est vraiment l’histoire du client qui nous inspire lorsque nous concevons des lieux. Nous ne puisons pas notre inspiration de nos histoires personnelles. C’est pour ça que nous avons écris une petite histoire sur cette cliente, et pas seulement un mood board pour pouvoir démarrer ce projet. On raconte des histoires aussi avec les décors. Les vitrines n’ont jamais été notre point fort, car elles restent quelque chose de très impersonnel.
JB: La maison est une machine qui doit marcher et qui se doit d’être fonctionnelle et pratique, qui corresponde aux envies du client. Il y a toujours une émotion qui doit passer. Nous devons comprendre comment les gens veulent vivre. Déceler et faciliter les modes de vie font partie intégrante de notre travail.
– Murs et tapis: entre ciel et terre?
JB: Il s’agissait d’avoir des éléments décoratifs et de mélanger les motifs, associer le marbre qui est très classique utilisé depuis le 18e siècle et de l’associer à ce tapis qui représente un sol asséché baptisé « the crash » pour que la tradeuse n’oublie pas l’imminence possible d’un crash boursier. Les murs évoquent une forêt qui permettent avec tous ces panneautages de tissus d’absorber le son et de donner un grand confort acoustique pour vraiment s’isoler et pouvoir se concentrer sur son travail
AM: Notre travail se base souvent sur la lumière, le son et l’odeur. Nous pouvons créer une sensation de bonheur et de bien être chargé au point que les clients le veulent. Il y a des clients qui veulent moins d’éléments, d’autres qui veulent vivre entourés de beaucoup d’objets, après c’est une gestion avec les clients.
JB: Notre modernité consiste à mélanger des objets que nous avons dessiné avec des pièces vintage comme les chaises de Paco Rabane.
AM: C’est toujours mélangé avec avec des pièces que l’on dessine comme le bureau, la table, la lampe, et aussi mélangé avec des choses improbables que l’on aime. C’est ainsi très improbable de retrouver des chaises dessinées par Paco Rabane car on ne le connait pas du tout pour ça, et c’était drôle de trouver cette paire de fauteuils que l’on sait ont appartenu et ont été dessiné par le créateur. Nous ne savons pas si c’était pour sa maison ou son bureau et ce sont des éléments inédits. Tout comme la console que nous trouvons exceptionnelle: nous savons qu’elle est d’origine italienne et date des années 50, mais nous avons essayé de savoir qui l’a désigné sans jamais y arriver.
Quelque fois ce n’est pas intéressant de connaitre le designer, le plus important est que l’objet soit joli. L’émotion provoquée et la qualité esthétique priment avant tout. Bien sur, s’il y a un nom, c’est toujours mieux, mais ce n’est pas le plus important.
JB: C’est aussi important de mélanger les œuvres, car une maison uniquement remplie d’œuvre de Picasso pourrait paraitre ennuyeux, c’est mieux de faire côtoyer les pièces d’artistes reconnus avec d’autres pièces d’artistes moins connus. La magie va naitre de toutes ces cohabitations. Il faut créer la surprise. Notre travail est de surprendre. Lorsque nous créons des ambiances il y a certains clients qui nous demandent des perspectives et à la fin il faut toujours que le client soit surpris.Quand un client nous dit qu’il ne s’attendait pas ça, notre travail est alors réussi.
AM: La surprise est comme une cadeau.
– Pouvez vous nous parler des artisans avec lesquels vous travaillez?
JB: Nous avons ramené tous nos artisans du Portugal, qui nous accompagnent dans le monde entier et avec lesquels nous travaillons depuis plus de 15 ans. Cela représente un gain de temps car ces artisans connaissent notre façon de travailler et nos exigences: ils savent déjà lire entre les lignes et ce sont surtout des gens passionnés.
Exposition AD Intérieurs 2015
Période : du 5 au 20 Septembre 2015 de 14h à 18h (entrée libre sur présentation d’une pièce d’identité)
Lieu : Palais d’Iéna – 9, place d’iéna Paris
crédit photo (si non libellé): SeenByKloé pour Blog Esprit Design.
Retrouver l’intégralité de notre dossier : BED – AD Intéieurs 2015
Plus d’info sur l’exposition : AD Intérieurs 2015
C’EST AINSI QUE LES HOMMES VIVENT…. et , VIVRONT ? Voila donc du gender design pour l’homme de demain qui visiblement est sur un tapis trompe l’oeil de sol qui craque sous ses pieds avec un motif quasi militaire de tissus de camouflage . Ils ont visiblement la tete dans le passé de leur fortune et ne voient pas le changement de paradigme . Une guerre economique mondiale à l’horizon ? Elle est dejà là. Ce qui me pose question c’est le on “comment allait on vivre demain? ” . Il est en effet difficile pour une haut decorateur de travailler avec un client virtuel…. Vico Magistretti qui via la lampe Atollo a reçu le Compasso d’oro en 1979 et est entré dans la collection permanente du MoMA.à New York doit se demander ce qu’il fait là dans ce decorum … Starck s’est fâché avec Alberto Alessi pour avoir introduit une version gold non fonctionnelle ( humour?)de son presse citron. Vico Magistretti etait donc dejà parti dans le paradis des designers quand ses ayants droits ont donné l’autorisation à son editeur O luce de completer la version alu ou opale par la tendance londonnienne et mondiale du moment. http://www.oluce.com/it/images/stories/news/project-be-original/projectbeoriginal-01.jpg