La revue d'architecture et de design
RONDIN par Arnaud Lapierre : entre mobilier d’accueil et manifeste artistique

Quel plaisir de retrouver à nouveau Arnaud Lapierre sur BED que nous suivons depuis de nombreuses années, en cette entrée, il dévoile le projet RONDIN.
Il signe une œuvre hybride et immersive, installée au cœur de l’espace d’accueil du Ministère de la Culture, au sein du Quadrilatère des Archives, à Paris.
Mi-assise, mi-tapis, cette pièce interpelle autant qu’elle habille l’espace, brouillant les lignes entre fonctionnalité, art et design..
Ceci n’est pas un tapis ! Ceci n’est pas un banc ! Ceci n’est pas une oeuvre ! ..
Une œuvre au croisement des usages et de la contemplation
RONDIN ne se contente pas de meubler un lieu. Pensée pour redéfinir la notion de « zone d’accueil », l’œuvre propose une nouvelle forme de présence, d’invitation à prendre du temps, peu mais efficace, à se poser. Le cylindre qui traverse un tapis circulaire de cinq mètres invite à une assise haute et dynamique, loin des codes du mobilier d’attente traditionnel. Plus qu’un confort ergonomique, c’est une pièce majeur qui impose.
Matérialité audacieuse et engagement durable
Composée de cylindres en bois imbriqués, recouverts de mousse biosourcée en soja, et posée sur un tapis tufté réalisé par la manufacture Robert Four, la pièce incarne un savoir-faire français d’exception. Les finitions, notamment les bouchons en chêne des marais, ajoutent une profondeur mate et élégante, tout en intégrant une dimension écologique affirmée.
Une palette chromatique issue du patrimoine
Les motifs abstraits du tapis, oscillant entre ocres, bleus et verts profonds, ne sont pas anodins. Arnaud Lapierre a puisé son inspiration dans Le Triomphe de l’Amour par les dieux, une fresque du XVIIIe siècle signée Antoine Coypel, restaurée récemment et installée à l’Hôtel de Rohan. Vue de haut, la composition colorée du tapis évoque une version pixélisée de l’œuvre classique, créant un pont visuel et symbolique entre l’histoire et le présent.
Une posture entre art public et design contextuel
Avec RONDIN, il s’agit moins de remplir une fonction que d’en révéler les contours par le geste artistique. L’objet s’inscrit dans une tradition de design contextuel : il s’ancre dans l’espace par le motif, s’accorde à l’architecture environnante et s’adresse à la mémoire collective. Ce mobilier sculptural devient un marqueur symbolique du lieu, une transition douce entre l’héritage patrimonial du Ministère et une vision contemporaine du design.
Une commande publique au service de l’innovation
RONDIN est né d’un appel à projet conjoint entre le Mobilier national et le Ministère de la Culture, visant à réinventer l’accueil dans les espaces publics.
En tant que pièce intégrée à la collection du Mobilier national, elle illustre la volonté institutionnelle de soutenir la création contemporaine tout en valorisant les savoir-faire d’excellence. Arnaud Lapierre, habitué aux dialogues entre espace, perception et matérialité, propose ici une lecture sensible et engagée de la commande publique.
En savoir plus sur le designer : Arnaud Lapierre